La Fédération SUD Santé Sociaux et la Fédération CGT de la santé et de l’action sociale sollicitaient l’annulation du décret n°2021-1570 du 3 décembre 2021 relatif aux CSE des établissements publics de santé, des établissements sociaux, des établissements médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire de moyens de droit public.
Le Conseil d’État dans un arrêt du 12 avril 2023 (CE n°461194) a rejeté l’ensemble de leurs pourvois. Cependant, plusieurs considérants apportent des précisions sur le fonctionnement des CSE.
Sur les visites de la formation spécialisée
Le Conseil d’État rappelle que doivent obligatoirement être inscrits à l’ordre du jour des réunions de la formation spécialisée les points dont l’examen a été demandé par la moitié au moins des représentants titulaires du personnel au sein de cette instance et qui entrent dans sa compétence. Il rappelle en outre que, parmi ses points, il peut y avoir une délibération mandatant une délégation de la formation spécialisée pour procéder à une visite des services et fixant l’objectif, le secteur géographique et la composition de cette délégation.
Le Conseil d’État précise que la circonstance que l’exercice du droit de visite des membres de la formation spécialisée soit conditionné à l’adoption d’une telle délibération ne méconnaît pas, par elle-même, les dispositions de l’article L.136-1 du Code général de la fonction publique, en vertu desquelles le CSE connaît « des conditions d’hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique [qui] sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ».
Ainsi, le Conseil d’État confirme que les visites doivent faire l’objet d’une délibération préalable.
Sur l’absence de recours à l’expertise pour les projets de réorganisation de service
Les projets de réorganisation de service sont examinés, en vertu de l’article L. 253-10 du Code général de la fonction publique, non par la formation spécialisée mais par le comité social d’établissement. Pour le Conseil d’État, ces dispositions ne méconnaissent pas le droit à la protection de la santé en prévoyant que le président de la formation spécialisée ne peut faire appel à un expert, en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, que lorsque ce projet ne s’intègre pas dans un projet de réorganisation de service.
Sur la possibilité de faire un recours contentieux sur les refus d’expertise
Pour mémoire, le président de la formation spécialisée peut refuser de faire appel à un expert malgré le vote majoritaire favorable des membres de la formation. Sa décision est communiquée à la formation spécialisée et doit être substantiellement motivée.
En outre, en cas de désaccord sérieux et persistant entre les représentants du personnel et le président de la formation spécialisée, l’agent de contrôle de l’inspection du travail est obligatoirement saisi par le président de la formation spécialisée ou par un ou des représentants du personnel, et adresse son rapport à la formation spécialisée et au directeur d’établissement ou à l’administrateur du groupement dans un délai qui ne peut excéder 45 jours.
Ce dernier est lui-même tenu d’adresser à l’auteur du rapport, dans un délai de 15 jours, une réponse motivée dont il communique copie, dans le même délai, à la formation spécialisée.
Pour le Conseil d’État, la possibilité, pour le président de la formation spécialisée de refuser de faire appel à un expert malgré le vote majoritaire favorable des membres de la formation, alors au demeurant qu’un tel refus constitue, contrairement à ce qui est soutenu, une décision susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, ne méconnaît pas en tout état de cause, par elle-même, le principe de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail garanti par le huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, ni le droit à la protection de la santé garanti par le onzième alinéa du même préambule, sans qu’ait à cet égard d’incidence la circonstance que le comité social d’établissement et la formation spécialisée ne seraient pas dotés de l’autonomie financière.
Ainsi, le Conseil d’État confirme que le refus par le chef d’établissement ou la cheffe d’établissement de refuser une expertise peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.
Sur l’ordre du jour des deux instances
L’ordre du jour des réunions du comité social d’établissement ou de la formation spécialisée instituée, le cas échéant, en son sein est fixé par leur président.
Le président est tenu de consulter au préalable le secrétaire du comité ou de la formation spécialisée, lequel peut proposer l’inscription de points à l’ordre du jour.
Pour le Conseil d’État, ces dispositions doivent être interprétées comme prévoyant l’inscription à l’ordre du jour des réunions de la formation spécialisée, et non seulement de celles du comité, des points entrant dans la compétence de ces instances dont l’examen a été demandé par la moitié au moins des représentants titulaires du personnel en leur sein. Aussi, une question (à l’exception par exemple des projets de réorganisation), si elle est officiellement demandée par la moitié des membres, doit obligatoirement être inscrite à l’ordre du jour de la formation spécialisée.
De même, les consultations rendues obligatoires par une disposition législative ou réglementaire sont inscrites de plein droit, par le président, à l’ordre du jour des réunions de la formation spécialisée comme de celles du comité, ces dernières comprenant d’ailleurs obligatoirement, lorsqu’il n’existe pas de formation spécialisée au sein du comité, un ordre du jour portant spécifiquement sur les questions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail.
Enfin, le Conseil d’État conclut que dans ces conditions, les dispositions du décret ne peuvent être regardées comme privant d’effectivité les dispositions légales qui mettent en œuvre le principe de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail garanti par le huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, au motif qu’elles prévoient que l’ordre du jour des réunions du comité ou de sa formation spécialisée est fixé par leur président.