Le Premier ministre et la ministre des Solidarités et de la Santé, le 13 février, dans le 5e chantier de transformation du système de santé, ont préconisé de repenser l’organisation territoriale des soins et, en particulier, d’approfondir les GHT dans le cadre de la gradation des soins.
En novembre dernier, dans un point d’automne sur les projets médicaux et de soins partagés, cœur du réacteur GHT et de la gradation des soins, nous constations que la « belle histoire » avait commencé.
Au creux de l’hiver, la « belle histoire » continue. Dorénavant sa nature est toutefois différente. Après le temps des structures, voici poindre celui de la culture. Après le temps du prescrit, voici venir celui du construit. Les toutes récentes annonces gouvernementales d’approfondissement des GHT ne manquent pas de renforcer cette évolution.
La belle histoire continue
Voilà donc bien une « belle histoire » : des GHT réalisés tout à la fois dans un calendrier serré et autour de « proximités impératives » nées du caractère obligatoire des groupements, selon l’expression de J.-B. Zimmermann.
Pour preuve, en juillet 2016, 135 conventions constitutives avaient été signées. Pour preuve encore en septembre 2017, plus de 80% des projets médicaux et de soins partagés avaient été réalisés. Pour preuve enfin, aujourd’hui, nombre d’entre eux ont été approuvés par les ARS.
Rappelons que la filière structure les projets médicaux et de soins partagés et ce faisant la gradation des soins. Plus d’un millier de filières émergent des projets médicaux et soignants. Début janvier, le gouvernement indiquait que 45% des filières étaient fondées sur les pathologies, 42% autour des prises en charge et 13% selon le type de population.
Après les structures, la culture
En théorie, on oppose le prescrit, le descendant (issu d’une obligation légale, doté de sanctions voire imposé par l’autorité de tutelle), par essence « structuraliste » et le construit, l’ascendant (sur la base du volontariat, avec un libre choix des partenaires et une prise en compte du tissu coopératif existant), « culturaliste ».
Dans un calendrier serré déjà mentionné laissant peu de temps à la réalisation du diagnostic territorial, les actions menées à ce jour ont été essentiellement structuralistes : rédaction des conventions constitutives, écriture des projets médicaux et de soins, constitution et réunion des instances du groupement, nomination d’un DIM de territoire, mise en œuvre de la mutualisation des achats, définition de la convergence des systèmes d’information…
En fait, cette « belle histoire » est, pour l’heure, très prescrite.
Aujourd’hui, il convient de faire naître rapidement le construit du GHT, la culture au sein du GHT. Pour cela, les acteurs doivent s’attaquer au pourquoi, bref donner du sens. En la matière, l’on peut très utilement se référer aux « cercles d’or » de Simon Sinek.
En tout état de cause, il convient d’associer pour co-construire. Prenons l’exemple des ressources humaines médicales et non médicales. Après le temps de la poussière sous le tapis, est venu celui du DRH ou du DAM « équipier, rassurant, manager de transition » (la culture), selon les mots de Stéphane Pardoux lors d’une récente journée d’études de l’adRHess, davantage qu’expert de la mise à disposition et de la nomination dans les fonctions (les structures).
- Expliciter le projet ;
- Développer un leadership fédérateur auprès de tous les acteurs ;
- Favoriser un style de management plus horizontal afin de mettre en place des environnements sécurisants ;
- Adapter la conduite du changement au contexte et à la maturité des acteurs afin de tenir compte des cultures professionnelles existantes et de l’historique des relations.
(« Un an après, les facteurs de réussite des GHT », Gestions Hospitalières,
n° 571, décembre 2017)
Indéniablement, des facteurs de réussite « culturels ».
Tout cela au prix de quelques redécoupages de GHT et d’un recours toujours accentué aux conventions de direction commune pour établir l’équation GHT + CDC = FDF ? Chut, ce n’est pas encore le printemps.
Hervé Tanguy – Dessin de Michel Hulin