La mesure essentielle sur cette thématique dans la loi n°2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé est bien évidemment celle de la gestion des ressources humaines médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques relevant de l’établissement support du GHT.
Sur ce point, l’urgence est managériale et organisationnelle avant d’être juridique.
Elle nécessite d’organiser la gestion au sein de l’établissement support sans déséquilibrer les rapports humains existants. Et chaque GHT devra trouver son organisation. Dans un GHT pouvant avoir le périmètre d’une ancienne région ou regroupant plus de quinze établissements, peut-on imaginer une direction des affaires médicales (DAM) similaire à celle d’un GHT moins conséquent ?
Sur le plan organisationnel, la question est davantage celle de la sécurisation et du pilotage.
L’établissement support doit-il intégrer la sécurisation des actes en se dotant d’un juriste spécialisé afin de faire face à la contractualisation galopante de la matière (contrat de recrutement, contrat de temps de travail additionnel, contrat d’activité libérale, convention d’activité partagée, convention d’engagement de carrière, droit d’option sur les astreintes, contrat spécifique sur le temps de travail des urgentistes…) ?
L’établissement support doit-il se doter d’un recruteur du personnel médical, profil atypique à inventer, maîtrisant à la fois les statuts et les règles de rémunération de l’hôpital public et la négociation salariale et ses techniques issues du privée ?
L’établissement support doit-il regrouper le maximum de la gestion technique en assurant la paye, la gestion de la retraite, le suivi de la masse salariale, l’organisation globale du temps de travail, la gestion des internes… ?
La réponse à ces questions définira le contour d’une direction des affaires médicales de territoire d’un point de vue organisationnel (et sur le papier…) mais elle ne résoudra pas la question managériale.
Car la question centrale sera le rôle de la communauté médicale au sein de chaque établissement. Le pouvoir ne passe pas par ces sujets techniques, mais par la liberté dans les recrutements, dans la constitution des équipes, dans l’organisation, non pas globale, mais service par service du temps de travail.
Car si l’on sait que le nouvel article L. 6144-2-1 du code de la santé publique institue une commission médicale de groupement dans chaque GHT, l’essentiel sera fixé par ordonnance.
Certes, un décret viendra déterminer les matières sur lesquelles ces commissions seront consultées, mais ce sont les ordonnances qui donneront la perspective et le contour de ce que sera l’organisation managériale d’une DAM de territoire puisqu’elles viendront préciser comment mettre en cohérence le fonctionnement et les champs de compétences des commissions médicales d’établissement et des commissions médicales de groupement ainsi que les attributions de leurs présidents respectifs. La possibilité de regrouper les instances au sein du GHT (bien au-delà des seules CME) élargira encore le débat.
Et sur le plan du droit, pour ce que nous évoquons, elles définiront l’articulation des compétences respectives en matière de gestion des ressources humaines médicales des directeurs d’établissements parties et des directeurs d’établissements supports de GHT.
Ainsi, en cette fin d’été, il est trop tôt pour avoir des certitudes sur ce que sera une direction des ressources humaines de territoire. L’heure est aux interrogations, aux questionnements et à l’inventaire des avantages de cette mesure, tout en veillant à ne pas créer, chez les médecins, un sentiment de rejet dans un contexte démographique périlleux et, chez les gestionnaires, une angoisse de l’avenir car il y aura toujours besoin de leurs compétences au plus près du terrain.
Dans cette attente, les mandats des présidents et des membres élus des CME et des établissements parties à un GHT sont prorogés jusqu’à la date d’institution des commissions médicales de groupement, au plus tard le 1er janvier 2021.
Jean-Yves Copin